Articles sur la démocratie directe parus dans le bulletin Verrue Quoi ?

Bulletin 1 : mai 2001

Histoire rurale 1 (débuts agriculture)


Bulletin 2 : juillet 2001

Annulation des élections de Loudun
Histoire rurale 2 (le défrichement et ses ravages)


Bulletin 3 : septembre 2001

Oui, il existe des élus à l'écoute des électeurs
Histoire rurale 3 (démocratie directe... sous Henri IV)


Bulletin 4 : novembre 2001

Histoire rurale 4 (mise en place de la forme actuelle des conseils municipaux)
Bulletin 5 : janvier 2002
Attention, une démocratie peut en cacher une autre
Bulletin 6 : mars 2002

        Faudrait s'entendre (une manière différente de discuter)

Bulletin 7 : mai 2002

        La présentation des budgets (la culture de l'opacité)
        La Région Poitou-Charentes et le développement durable

Bulletin 8 : juillet 2002

        "Verrue Quoi" fait de la politique (notre association lutte pour la démocratie directe)
        L'occupation des niches écologiques (comment porter un regard neuf sur de vieux problèmes)

Bulletin 9 : septembre 2002

        L'élection du Conseil des jeunes (créer un organe d'expression est bien, encore faut-il qu'il soit ouvert)
        Gouvernance, le nouveau mot à la mode (définition et commentaires)

Bulletin 10 : novembre 2002

Ce n'est pas parce que c'est écrit (l'importance du sens critique)
Bulletin 11 : janvier 2003
Les différends entre Loudun et la CCPL (manque de transparence à la CCPL)

Bulletin 12 : avril 2003

Le coup du pagure
Notes de lecture : pour une nouvelle gouvernance de Jean-Pierre Raffarin

Bulletin 13 : juin 2003

WYSIWYG
Bulletin 14 : septembre 2003
La participation à Monts sur Guesnes
Bulletin 15 : novembre 2003
Le rôle des associations
Bulletin 16 : janvier 2004
Du bon usage de la discussion
Bulletin 17 : mars 2004
La participation à Verrue
De la démocratie (1)
Les statuts de la CCPL : un problème de fédéralisme
Bulletin 18 : juin 2004
De la démocratie (2)
Bulletin 19 : juillet 2004
De la démocratie (3)
(A la suite de mon départ de l'association Verrue Quoi, je n'ai plus publié d'articles dans son bulletin après l'été 2004

Tous les articles cités sont de Renaud Fortuner (fortuner@wanadoo.fr), sauf indication contraire.



Bulletin 1(1) : mai 2001

Histoire rurale / 1

Pour quiconque s'intéresse au monde rural, il est un livre passionnant, L'Histoire de la France rurale, ouvrage collectif publié en 1975 sous la direction de Georges Duby et Armand Wallon et qui vient d'être réédité dans la collection "Points Histoire" des éditions du Seuil.

On y apprend par exemple que, dans ce qui deviendra la France, la première civilisation agricole s'est installée dans le Bassin Parisien en 4000 avant JC, arrivant du Moyen-Orient avec la civilisation dite de la céramique rubanée. Déjà, "on observe que chaque village renferme, toujours à un seul exemplaire, une maison un peu plus grande et plus solidement construite que les autres (…) on doit vraisemblablement y voir la demeure de la famille d'un individu socialement prééminent."

Et voilà ! Ruraux, ça fait 6000 ans que vous vivez sous les ordres "d'individus socialement prééminents". Ne croyez-vous pas qu'il est temps de retrouver votre liberté ?




Bulletin 1(2) : juillet 2001

Annulation des élections de Loudun

Vous savez sans doute que les élections municipales de Loudun ont été annulées le mois dernier. La raison ? D'après les journaux, le commissaire du gouvernement a surtout visé une lettre ouverte signée de René Monory qui appelait à voter pour Jean-Pierre Fredaigue et qui assurait ce dernier du soutien du Département, notamment en termes d'installations d'entreprises et de création d'habitat (Centre Presse du 14 juin 2001). Le commissaire du gouvernement a en effet jugé qu'il s'agissait là d'une pression exercée sur les électeurs.

Ce motif, à lui seul, aurait justifié l'annulation de l'élection, même en l'absence des autres motifs retenus. C'est donc René Monory lui-même qui a provoqué la chute de son poulain en oubliant que plus on pousse loin l'autocratie, plus il faut la masquer derrière les apparences de la démocratie. Le vieux Sire du Loudunais aurait-il perdu la main ? La vieillesse est un naufrage, disait De Gaulle…

Espérons en tous cas que les habitants de Loudun sauront profiter de la nouvelle chance qui leur est donnée et que, surmontant leur dégoût pour les magouilles politicardes, ils éliront une équipe neuve et respectueuse des règles démocratiques.
 
 



Bulletin 1(2) : juillet 2001

Histoire rurale / 2

J'ai évoqué dans le dernier bulletin l'arrivée des premiers agriculteurs en France, il y a 6000 ans, d'après L'Histoire de la France rurale de Georges Duby et Armand Wallon (collection "Points Histoire" des éditions du Seuil).

Au début les défrichements ont été bien timides et "autour du village et de ses champs, assez proche sans doute, régnait toujours la forêt" (tome 1, page 149). Bien vite pourtant les défrichements s'étendent ("on peut y aller, ce ne sont que des robiniers" a déclaré un chef chasséen…) et, "entre 3500 et 2500 avant notre ère, la quasi-totalité du territoire actuel de la France était touchée par (…) la culture des céréales et l'élevage" (page 170). Dans le Languedoc, la forêt primaire est totalement détruite et la dégradation du sol provoque l'abandon des villages : "jamais plus par la suite les garrigues ne connaîtront un peuplement sédentaire comparable à celui qu'elles ont connu au chalcolithique" (page 172).

Comme vous le voyez, les erreurs de développement ne datent pas d'hier mais faut-il vraiment imiter les erreurs de nos lointains ancêtres ?
 



Bulletin 1(3) : septembre 2001

Oui, il existe des élus à l'écoute des électeurs !
Geneviève Delachaume

J'étais en voiture l'autre jour et j'écoutais la radio pour avoir des informations. Ce que j'ai entendu m'a évidemment fait dresser l'oreille. On nous racontait ce qui suit :

Notre voisin, le Pays des six vallées qui regroupe plusieurs communes et communautés de communes du Poitou-Charentes (entre autres Ligugé, Lusignan, Vouillé, etc.) a lancé sur son territoire une grande enquête relayée précisément par les communautés de communes. Un questionnaire a été adressé il y a quelques mois à tous les habitants ; les réponses seront analysées et, à la suite de ce travail, un projet répondant au plus juste aux préoccupations, aux besoins et aux attentes de tous sera élaboré.

Le journaliste concluait : "Citoyens, pour une fois qu'on vous donne la parole, prenez-la !" (A méditer).

La mairie de Lusignan à qui je me suis adressée a eu la gentillesse de m'envoyer sa documentation que je tiens à la disposition de toutes les personnes curieuses de voir comment procèdent, tout près de nous, des élus soucieux de recueillir l'avis des citoyens et de construire l'avenir avec eux.

Il faut en effet signaler que la France, comme l'ONU et la plupart des grands pays d'Europe et du monde, a accepté le principe d'un "développement durable" qui doit répondre à des préoccupations souvent contradictoires : économiques, sociales et écologiques. Ce principe, exposé dans des textes, normes et programmes mondiaux, va bien au-delà de la simple protection des ressources naturelles. Il contient les exigences suivantes :

- participation des parties prenantes et droit à la négociation collective ;
- dépassement des dispositions législatives minimales  ;
- contrôle des grands projets par des organismes indépendants non gouvernementaux pour vérifier le respect des principes de la durabilité ;
- transparence assurée par la publication régulière de rapports.

A côté de cela, je lis dans un article du 23/07 de la Nouvelle République : [Pour René Monory, le projet de Naturascope va vite – "On n'avait pas encore acheté Beaumont il y a un an" et le permis de construire pourrait être déposé prochainement, peut-être à la fin du mois] (citation).

Tous les citoyens ne voient pas dans cette rapidité la meilleure garantie de sérieux d'un projet qui bafoue toutes les règles du développement durable :

- absence de consultation de la population (quand on part du principe, comme l'indiquait notre nouveau Conseiller Général au cours de sa campagne, que le maire est le premier maillon de la démocratie, il suffit en effet de réunir quelques délégués des municipalités au sein d'une communauté de communes et des décisions graves sont prises en un quart d'heure, à main levée et à l'unanimité, sous l'oeil sévère du dieu local) ;

- application minimale des lois de protection de l'environnement ;

- la vérification du respect par le projet des principes de développement durable n'a jamais été mentionnée ;

- absence de transparence, entre autres sur les points suivants :
1. les documents légaux sont fournis avec réticence par la CCPL aux associations qui les réclament et il a fallu à plusieurs reprises intervenir auprès du sous-préfet ou des services administratifs compétents.
2. des sondages ont été faits dans le parc de Beaumont mais bizarrement aucun résultat n'a été donné . La nappe phréatique se maintient à 1 m environ au-dessous de la surface du sol dans la partie dite "sèche" du parc, là où sont prévues les constructions. Quelles sommes d'argent public va-t-on gaspiller pour bâtir sur cette éponge ?

Résultat, le projet s'empêtre dans ses contradictions car, après tout, la référence qu'on ne cesse de nous vanter est bien le Futuroscope :

- Nouvelle République du 6/7/2001 : la CGT signale que, malgré son succès, le Futuroscope a connu un "déficit d'exercice de plusieurs dizaines de millions de francs" l'an dernier et ceci malgré les attractions nouvelles, "une par an" d'après l'article du 19/7/2001 (Echos de la planète Futuroscope) depuis la vente du Futuroscope à la société Amaury. S'il y a fuite en avant au Futuroscope pour ressusciter l'intérêt du public et échapper à l'usure et au déficit, gageons que le principe devra être le même au Naturoscope. Comment croire alors qu'à long terme la forêt sera respectée et qu'il ne faudra pas trouver des rallonges budgétaires pour attirer de nouveau le public ?

- Faut-il s'étendre sur la qualité des emplois créés au Futuroscope : contrats à durée déterminée "d'une heure [!!!] à plusieurs mois" et très peu de contrats à durée indéterminée (Nouvelle République du 6/7/2001) ?

Une autre contradiction mériterait sans doute d'être approfondie. La NR du 10 août 2001 nous parle de "La bonne eau de Scévolles". Je cite : "présence de fer, de manganèse, forte minéralisation, excellente qualité bactériologique et teneur en nitrates proche de 0 mg/l". A une époque où le ministère de l'environnement nous demande par télévision interposée de faire attention à l'eau, de fermer le robinet chaque fois que c'est possible pendant que nous nous brossons les dents, nos collectivités ne devraient-elles pas considérer cette eau comme une richesse naturelle régionale à protéger de tout risque de contamination dans un souci de santé publique ?

Le Naturascope a-t-il le feu aux trousses ? Nous pouvons certainement parier que le projet du Pays des Six Vallées se réalisera, lui, sur un rythme sage mais le travail bien fait a toujours pris du temps !
 



Bulletin 1(3) : septembre 2001

Histoire rurale / 3

Poursuivant ma lecture de l'Histoire de la France rurale de Georges Duby et Armand Wallon (collection "Points Histoire" des éditions du Seuil) et sautant allégrement quelques siècles, je tombe dans le tome 2 (pages 265-266) sur cet intéressant passage qui a trait au pouvoir municipal dans les villages au XVIIe siècle :

"L'organe essentiel de la communauté était formé par la réunion des chefs de famille qui pouvaient y siéger et y voter. (…) L'assemblée jouissait d'une très large liberté, même lorsqu'elle était présidée par les officiers seigneuriaux. C'est elle qui prenait toutes les décisions importantes pour la vie de la communauté, qui élisait ses représentants et ses agents. (…) Tous ces élus n'étaient que des mandataires qui revenaient rendre compte devant l'assemblée ou solliciter un nouveau pouvoir pour résoudre un problème nouveau ou engager une dépense extraordinaire."

Comme nous sommes loin de ce bon vieux temps et comme nous avons régressé ! De nos jours, le président de la CCPL, René Monory, écrit aux maires à qui Bien Vivre en Scévolles demandait d'expliquer leur vote du projet Naturascope : "Le vote de la population fait de vous son représentant légal (…). C'est par ce même vote qu'elle jugera du bien fondé de vos engagements". En somme, une fois élu, on est libre de faire ce que l'on veut pendant six ans, même pour prendre des décisions sur des questions qui ne se posaient pas lors de l'élection. Les politiciens espèrent bien que leurs erreurs seront oubliées et que de toutes façons, lors de l'échéance suivante, il sera trop tard et l'avenir aura été engagé.  Pourtant, on savait déjà sous Henri IV que l'assemblée des habitants d'une communauté est seule habilitée à "résoudre un problème nouveau ou engager une dépense extraordinaire".

Ce passage de l'Histoire de la France rurale montre bien que la démocratie directe n'est pas une utopie. Ce ne serait qu'un retour à une situation qui était normale il y a trois siècles.
 



Bulletin 1(4) : novembre 2001

Histoire rurale / 4

Pour en terminer avec l'Histoire de la France rurale de Georges Duby et Armand Wallon (collection "Points Histoire" des éditions du Seuil), je note dans le tome 3 quelques dates importantes dans la mise en place des institutions communales qui nous sont familières.

Pendant la Restauration (1815-1830), seuls les députés sont élus (uniquement par les hommes qui paient au moins 300 francs d'impôt direct –le cens–, somme considérable à l'époque et qui écarte tous les ruraux). Le maire et les conseillers municipaux sont nommés par le préfet (page 131).

Après la Révolution de Juillet, le cens est abaissé à 200 francs et quelques gros "laboureurs" peuvent voter. La loi de 1881 permet l'élection des conseillers municipaux parmi lesquels le préfet continue de désigner le maire et ses adjoints (page 144).

Ce n'est qu'après l'établissement de la IIIe République, en 1881, que les conseils municipaux obtiennent le droit d'élire eux-mêmes le maire (page 354).

Les structures communales que vous considérez sans doute comme immuables – parce que vous les avez toujours connues et que vos parents et vos grands-parents n'en connaissaient pas d'autres – ne datent donc que de 120 ans, la durée d'une vie de doyenne des Français, une broutille à l'échelle de l'Histoire.

Ces structures ont changé dans le passé, elles continueront d'évoluer mais dans quel sens ? On peut espérer que l'évolution que l'on observe en France depuis la Restauration se poursuivra et qu'elle continuera à donner de plus en plus de pouvoirs à chaque citoyen, c'est-à-dire à vous et à moi. L'étape finale pourrait bien être la démocratie directe qui nous débarrassera de la tutelle des "individus socialement prééminents" dont je parlais dans le numéro 1 de ce bulletin – chefs de guerre, chefs de tribu, nobles, rois, riches propriétaires censitaires et maintenant notables locaux – et qui nous rendra la liberté qui était la nôtre il y a six mille ans.
 



Bulletin 5 : janvier 2002

Attention : une démocratie peut en cacher une autre...

En marge de toutes ces histoires de parc, nous assistons à un débat dans lequel partisans et adversaires du Naturascope s'accusent mutuellement de bafouer les principes démocratiques. Ces discussions ne sont pas étonnantes en raison de l'imprécision du concept de démocratie. A l'heure actuelle, tous les pays du monde s'en réclament, même les plus autoritaires. On l'a bien vu du temps de l'URSS où les pays satellites d'Europe de l'Est prétendaient être des "démocraties populaires". Ici, l'une des listes battues lors des dernières élections municipales à Verrue s'appelait "démocratie directe" mais d'autres n'hésitent pas à lui refuser tout droit de s'exprimer, toujours au nom de la démocratie. Une chatte n'y retrouverait pas ses petits et je pense qu'il est bon de préciser quelques points.

Démocratie vient du grec demos, le peuple, et de crator, le pouvoir. Elle a été définie comme le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Notez bien que, en théorie, le gouvernement doit être exercé "par le peuple".

Or, M. Monory, relayé par les politiciens locaux qui se réclament de lui, refuse au "peuple" tout droit de regard sur les décisions prises par les élus, une fois les élections terminées. D'après lui, les élus tirent leur légitimité de l'élection et ils n'ont plus de compte à rendre jusqu'à l'élection suivante.

Je vois ici un grave problème. Les "élus", et surtout ceux qui occupent les postes les plus élevés, comme M. Monory lui-même, sont choisis par les partis politiques traditionnels ou par les groupes d'intérêt local parmi un petit nombre de personnes qui constituent ce que l'on appelle la classe politique. Le droit des citoyens se résume donc à choisir parmi ces personnes celles qui décideront pour eux. Un régime dans lequel le pouvoir appartient à un petit groupe de personnes est une oligarchie (du grec oligo, peu nombreux), qu'il ne faut surtout pas confondre avec une aristocratie (du grec aristos, les meilleurs). Puisque les citoyens ont tout de même le droit de s'exprimer de temps en temps, je propose d'appeler le régime que nous subissons actuellement une "démocratie oligarchique".

Il faut bien reconnaître que cette situation est celle de ce que l'on appelle les "démocraties occidentales" et celle aussi de notre pays depuis 200 ans (avec des hauts et des bas). Qu'on la regrette ou non, elle a pour elle la force de la tradition.

Ce n'est pas le cas d'une nouvelle conception de la démocratie qui a vu le jour il y a peu, à la suite de déclarations de certains promoteurs du Naturascope, reprises par de nombreux "pro-parcs". D'après ces personnes, les élections municipales de mars 2001 dans le Loudunais peuvent être considérées comme une sorte de référendum sur le parc. Etant donné que les listes se présentant comme "anti-parc" ont été battues, elles n'ont plus droit à la parole ! Transposé au niveau national, un tel système reviendrait à refuser tout droit de s'exprimer aux partis de l'actuelle minorité, UDF, RPR, etc. !

Nous arrivons donc à une sorte de dictature de la majorité, appelons-la "démocratie dictatoriale majoritaire" pour faire bien.

Vous allez voter bientôt pour élire votre député. Généralement, les gens votent pour un parti plus que pour un homme mais les partis, c'est à Paris, tandis que l'homme que vous allez élire, c'est ici, c'est lui qui va avoir une influence considérable sur la vie locale.

Bien définir la notion de "démocratie" me paraît donc primordial. Connaître la conception qu'en ont nos futurs élus ne l'est pas moins. Leur conception détermine en effet leur attitude pratique : si les gens qui nous gouvernent ne s'étaient pas comportés en oligarques, ils n'auraient jamais lancé ce projet de parc comme ils l'ont fait. Ils vous auraient demandé quels étaient vos besoins, ils auraient recueilli les idées de développement capables de répondre à ces besoins et ils vous auraient demandé de choisir vous-mêmes l'idée qui vous paraissait la meilleure. On peut parier que le parc serait arrivé bon dernier tandis que vous êtes en majorité "pro-parc" parce que vous avez l'impression (et vous avez raison) que, tant que durera l'oligarchie actuelle, vous n'aurez que le choix entre ce parc et rien.

Les élections qui approchent vous donnent l'occasion de poser les deux questions suivantes à chaque candidat :
"Pensez-vous qu'un élu "tire sa légitimité de l'élection" et qu'il n'a donc pas de compte à rendre aux citoyens qu'il représente avant l'élection suivante ?"
"Pensez-vous que la minorité a le droit d'exprimer son désaccord sur les décisions de la majorité en place et de faire des propositions ?"

Ce sont des questions importantes, et je vous adjure de les poser parce que, si vous ne saisissez pas cette occasion, vous allez une fois de plus voter uniquement pour vous choisir un nouveau maître. N'y a-t-il donc que des esclaves dans le Loudunais ?
 
 



Bulletin 6: mars 2002

Faudrait s'entendre…

Il est souvent question de démocratie directe dans ce bulletin. Ce principe consiste à redonner le véritable pouvoir aux individus, à vous et moi, au lieu de le confier à un petit groupe ou à un parti. Lorsque chacun de nous aura voix au chapitre, il faudra modifier des habitudes bien ancrées et trouver un moyen de prendre des décisions sans trop de conflit.

En effet, à l'heure actuelle, que font deux personnes qui discutent ? Chacune choisit son camp et cherche à "vaincre" son "adversaire" en lui assénant des arguments plus ou moins fondés et même plus ou moins honnêtes. Le plus souvent, chacun reste sur ses positions ; parfois il y a un gagnant ou un perdant, en tous cas deux personnes fâchées à mort.

Si le sujet de la discussion est grave, le risque est grand de voir cet affrontement dégénérer : arguments spécieux, mensonges et même injures et coups ou, s'il s'agit d'un débat entre groupes politiques, rumeurs, attentats, terrorisme… Il n'est pas nécessaire d'aller au Moyen-Orient pour voir ça, il suffit de se promener dans la forêt.

Il faut pourtant réussir à changer ces mauvaises habitudes si nous voulons établir un jour une véritable démocratie.

Ne vous méprenez pas : je ne vais pas prêcher la bonté de l'homme. Je ne suis pas si naïf. Je sais bien que Homo sapiens sapiens est naturellement teigneux et qu'on ne le changera pas.

Par contre, il est possible de lui apprendre quelques techniques simples de discussion positive. Voici ma recette en deux principes et trois étapes :

Principe n° 1 – Il faut commencer par se mettre bien en tête qu'une discussion n'est pas un combat entre adversaires mais la recherche en commun de la meilleure solution possible à un problème bien identifié.

Principe n° 2 – il ne faut pas perdre de vue ce précepte essentiel : la fin ne justifie JAMAIS les moyens, ce qui veut dire que si la solution retenue, bonne en soi, repose sur des moyens mauvais, ces moyens vont pervertir la solution et, même si un but est atteint, ce sera un but mauvais ayant à plus long terme des conséquences désastreuses.

Et maintenant la technique :

Etape n° 1 – Il faut donc commencer par définir le but à atteindre sans avoir de buts cachés. Par exemple, si je prétends que le but recherché est le développement économique d'une région mais si mon but réel est la satisfaction de mes ambitions politiques, il me sera impossible de parler honnêtement avec quelqu'un qui, lui, cherchera vraiment à développer la région.

Etape n° 2 – Il faut ensuite faire la liste de tous les moyens possibles et imaginables, même les plus stupides, qui permettent d'arriver au but cherché. L'important à ce moment est que les parties en présence ne s'approprient pas une des options de la liste. Si l'une d'elles le fait, elle perd son objectivité et elle cherchera à faire gagner "son" option, même si elle n'est pas la meilleure.

Etape n° 3 – Il faut ensuite chercher les avantages et les inconvénients de chaque option. Il est préférable que cette recherche se fasse en commun entre toutes les parties intéressées car, de cette manière, il devient possible d'envisager chaque option d'un œil objectif. Toutes les personnes participant à la discussion proposent des arguments pour ou contre telle ou telle option en oubliant par qui elle a été proposée à l'origine.

Bien entendu, l'option présentant le plus d'avantages et le moins d'inconvénients est retenue.

Si on applique cette technique bien simple, il est possible d'arriver à s'entendre, au moins sur certains points. Il se peut qu'au début l'accord ne soit possible que sur des questions mineures mais ceci a au moins l'avantage de faire collaborer les anciens adversaires, leur donner le temps de se connaître, peut-être de mieux se comprendre et, qui sait, de s'estimer. Il leur sera alors possible d'aborder plus sereinement les anciens points de désaccord.
 
 


Bulletin 7 : mai 2002

La présentation des budgets
Geneviève Delachaume

Il m'a été donné d'assister récemment à deux présentations de budgets, celui de la CCPL à Berthegon, le 21 mars 2002 et celui de la commune de Verrue, le 25 mars 2002

La comparaison était tout à fait intéressante :

L'énorme budget de la CCPL a été passé très rapidement en revue par M. Belin.
A la fin de la présentation et juste avant le vote, Mme Marchand, première adjointe au maire de Loudun et représentante de la ville à la CCPL a regretté que les balances comptables remises aux divers délégués juste avant la séance n'aient pas été distribuées plus tôt pour que chacun ait le temps de les étudier. Comme par hasard, c'est une conseillère municipale de Loudun qui demande davantage d'information sur le budget de la CCPL. On sait que les erreurs de gestion précédemment commises à Loudun ont nécessité une très importante augmentation des taxes locales. Ce genre de choc est peut-être salutaire mais nous aimerions bien que d'autres élus manifestent leur désir d'explications...

M. Monory a répondu à l'observation de Mme Marchand : "Ce sera fait à l'avenir mais là, il faut qu'on avance !". Un autre des responsables a indiqué "il y a eu beaucoup de travail effectué en amont", ce qui voulait dire "on a bien travaillé, faites-nous confiance".
Le budget a été voté ; il n'y a eu que 3 abstentions.

M. Monory a annoncé que la prochaine fois la présentation du budget serait encore simplifiée et regroupée : "C'est trop long, tout ça....". Comme cela, ceux qui voudront y comprendre quelque chose ne pourront pas voir le détail même s'ils disposent des balances comptables plusieurs jours à l'avance...

Le budget de Verrue, notablement moins gros comme on s'en doute, a été longuement détaillé par un comptable du trésor clair et pédagogue en présence bien sûr du Maire et du Conseil Municipal.

Même les non professionnels pouvaient suivre facilement (j'ai pu noter pratiquement tous les chiffres) et bien comprendre la mécanique comptable appliquée. Je ne sais pas à quel moment les conseillers municipaux avaient reçu les balances comptables et s'ils avaient eu le temps de les étudier avant la séance, mais ce que je peux dire, c'est que la présentation du budget de la commune était limpide et n'a pas été bâclée !

Fournir une information claire est un moyen pour les élus de montrer qu'ils n'ont rien à cacher et c'est une preuve de respect de leurs concitoyens.
 
 
 


Bulletin 7 : mai 2002

La Région Poitou-Charentes et le développement durable

Pour ceux d'entre vous qui ont accès à Internet, je conseille vivement une visite au site de DSR, Développement Responsable et Solidaire en Poitou-Charentes :
http://www.parole-publique.com/

"Expérimentation inscrite au contrat de plan Etat-Région pour la période 2000-2006, DRS engage dans le cadre d’un protocole d’accord, aux côtés de l’Etat et de la Région, l’Institut de formation et de recherche en éducation à l’environnement - Observatoire Régional de l'Environnement (Ifrée-ORE), l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME), et quatre Pays de la région : le Sud Charente, Marennes-Oléron, le Mellois, et les Six Vallées." (Nous avons parlé ici du projet des Six Vallées : voir l'article de G. Delachaume dans le numéro 3, page 3).

Le site Internet comporte la description de ce qu'est le développement durable, principe accepté par 173 pays, dont la France :

"La clé de voûte du développement durable est la participation de l’ensemble de la population aux décisions concernant l’avenir du territoire. Au-delà de la simple motivation des habitants à s’intéresser à la vie de leur pays, l’enjeu réside dans une réelle participation à la mise en œuvre des projets du territoire."

Un tel projet exige, entre autres ;
"Existence d’instances de dialogue, d’information"
"Volonté des élus de permettre, prendre en compte, soutenir, la participation des habitants"

Quand il est question de faire participer la population, il ne s'agit pas d'obtenir son accord sur un projet parachuté de manière autoritaire mais "de parvenir à une authentique élaboration participative des différentes actions et du projet global de territoire". Que l'on soit pour ou contre le Naturascope, il est un fait que ce projet est sorti tout armé comme Athéna de la tête de Zeus au cours de l'été 2000 sans qu'il y ait eu la moindre consultation préalable de la population.

On peut donc se demander pourquoi le projet de Naturascope ne respecte pas les principes auxquels adhèrent la Région et l'Etat et pourquoi, dans ce cas, il est pourtant soutenu par un certain nombre de responsables politiques et administratifs du Poitou-Charentes. N'y a-t-il pas là un manque de cohérence pour le moins bizarre ?

Vous allez bientôt voter pour élire votre député qui aura un grand poids dans la définition des orientations économiques de notre petite région. Je vous conseille vivement de demander aux divers candidats s'ils acceptent qu'un projet de développement soit imposé par le haut ou s'ils souscrivent aux principes du développement durable.
 
 


Bulletin 8 : juillet 2002

Verrue Quoi fait de la politique !

Notre association fait-elle de la politique ? C'est une question qu'on nous pose souvent ces temps-ci, une question à laquelle j'ai beaucoup de mal à répondre.

En effet, qu'est ce que ça veut dire, "faire de la politique" ? Pour la grande majorité des gens, cette expression a deux sens bien précis.

Le premier se rapporte aux actions des grands partis politiques, ce qui se passe à Paris en somme. Dans ce sens-là, Verrue Quoi ne fait pas de politique parce qu'on trouve parmi ses membres aussi bien un communiste avec sa carte du parti qu'un gaulliste "historique", des UDF comme des socialistes ou des "écolos" et même des personnes qui, comme moi, s'opposent à l'idée même de parti politique.

Le deuxième sens de l'expression est plus proche de nous et se réfère aux notables locaux, à ces gens qui restent maires de leur village pendant toute leur vie, quand ils ne lèguent pas leur charge à leur fils aîné, ou aux gens qui considèrent qu'être élu conseiller municipal est un titre de gloire qui les remplit d'orgueil alors que ce devrait être une responsabilité qui les terrifie.

Là encore, Verrue Quoi ne fait pas de politique et le but de notre association n'est pas de préparer les prochaines élections municipales. Ceux parmi ses membres qui se sont présentés aux élections de l'année dernière l'ont fait en raison de circonstances exceptionnelles. Aucun de nous n'a manifesté l'intention de se représenter la prochaine fois.

Alors, Verrue Quoi ne ferait pas de politique du tout ? Pas tout à fait, parce qu'il existe un autre sens du mot, le sens originel en fait. Politique vient du grec "polis", la ville, et ce mot se rapporte donc à l'administration de la ville, qu'il s'agisse des principes généraux de cette administration ou de l'application quotidienne de ces principes.

Notre association n'a jamais caché qu'elle avait une certaine conception de la manière dont la ville, en l'occurrence notre commune de Verrue, devait être administrée. C'est le principe de démocratie directe dont il est souvent question dans ces pages. Sur le plan de l'application de ce principe, nous revendiquons le droit de nous intéresser aux affaires du village, d'exprimer nos inquiétudes et nos questions et, le cas échéant, de manifester notre désaccord avec la municipalité.

Cette action est en droite ligne avec notre concept de démocratie directe selon lequel le pouvoir appartient à chaque individu. Nous savons bien que cette idée s'oppose à la tradition établie depuis longtemps dans les communes de la région où le maire, une fois élu, fait ce qu'il veut (ou ce que veut Loudun) sans trop s'occuper de l'opinion de ses administrés.

Tradition n'est pas loi et tout citoyen a le droit, légalement et constitutionnellement, d'assister aux séances du conseil municipal, d'y prendre des notes, de poser des questions au maire oralement ou par écrit, dans un bulletin tel que Verrue Quoi par exemple, et de signifier son opposition éventuelle à telle ou telle décision. Nous entendons continuer d'exercer ce droit.

En revanche, cette participation active à la vie du village n'est pas une opposition systématique à l'équipe en place. Nous n'hésitons pas à applaudir ses décisions lorsqu'elles nous paraissent heureuses et nos questions ont surtout pour but d'attirer son attention sur de possibles dangers posés par des décisions qui nous semblent contestables. Loin d'être une opposition systématique, nous voulons être la voix de tous ceux qui souhaitent faire savoir à la municipalité comment est vue son action. Nous espérons que la municipalité est prête à écouter cette voix dans le même esprit que celui qu'a manifesté M. Raffarin qui, dans la déclaration faite après les résultats du scrutin du 16 juin, a déclaré : "l'opposition sera évidemment et naturellement respectée". Nous n'en demandons pas plus.
 
 



Bulletin 8 : juillet 2002

L'occupation des niches écologiques

L'homme est un drôle d'animal, vous en conviendrez, mais c'est quand même un animal (mammifère vertébré de la famille des hominidés, genre Homo, espèce sapiens, sous-espèce sapiens). Envisager l'homme, ses prétentions et tous les problèmes qui se posent à lui (ou qu'il se pose à lui-même) sous l'angle de la biologie a le mérite de nous donner un nouveau point de vue qui nous permet de sortir de l'ornière des discussions politicardes habituelles. Voyez la question de l'insécurité par exemple. Comme le dit Jacques Albert dans son article sur les histoires vraies de Scévolles, il est souvent question aujourd'hui de la violence et de l'insécurité. Pour certains, la solution passe par une plus grande sévérité dans la répression.

Sans prendre position ici sur ce point, Verrue Quoi n'étant pas un journal politique au sens habituel du terme, je voudrais proposer une comparaison tirée de l'écologie (1).

Dans un écosystème (2), chaque espèce occupe une "niche écologique" qui dépend du mode de nutrition de l'espèce et de ses relations avec les autres espèces de l'écosystème. Si cette espèce disparaît, sa niche, devenue libre, est automatiquement ré-occupée par une autre espèce ayant un mode de nutrition et des comportements similaires. A condition bien sûr que les conditions de milieu n'aient pas changé : si la disparition de l'espèce est due à la disparition de ses sources alimentaires, c'est sa niche écologique elle-même qui disparaît.

Pour en revenir à la question de la violence et de l'insécurité, si la répression se contente de mettre en prison le délinquant capturé par la police sans supprimer la niche écologique dont il vivait, cette niche sera immédiatement réoccupée par un autre délinquant. Seule la suppression de la niche écologique interdirait une telle réoccupation. En fait, si on supprimait toutes les niches écologiques dont vivent les délinquants, la répression deviendrait inutile puisque les délinquants, privés de niche, disparaîtraient d'eux mêmes !

Sans aller jusqu'à une telle utopie, il est bon d'observer la nature et de nous demander si nous ne ferions pas mieux de nous occuper des niches écologiques de la criminalité plutôt que de construire des prisons ou de remettre à la mode les maisons de redressement d'antan.
 
 

(1) Quand je parle d'écologie, je ne parle pas du parti politique qui utilise ce nom à tort mais de la science qui s'occupe "des rapports des êtres vivants entre eux et avec le milieu qu'ils habitent".

(2) : Ecosystème : ensemble structuré, composé d'un biotope (aire géographique bien délimitée, caractérisée par des conditions écologiques particulières : sol, climat, etc.) et d'une biocénose (ensemble des êtres vivants qui occupent le même biotope).
 
 


Bulletin 9 : septembre 2002

L'élection du Conseil des Jeunes

Comme il a été annoncé le 13 juin lors du conseil municipal, un Conseil Intercommunal des Jeunes est en train d'être mis en place au niveau du regroupement pédagogique de Monts sur Guesnes. Il se compose de 15 jeunes élus dans les communes de Berthegon, Dercé, Guesnes, Monts sur Guesnes, Princay, Saires et Verrue.

Le conseil a pour mission d'écouter les idées et les avis des jeunes, de faire des propositions pour contribuer au développement local du territoire, de mettre en place, seul ou en partenariat avec des associations, des activités sportives, culturelles et de loisirs destinées à tous les jeunes et de consulter les jeunes sur des projets des municipalités.

Comme on le voit, la mission de ce conseil des jeunes est tout à fait dans la ligne de la démocratie participative (voir l'article sur la gouvernance dans ce numéro), premier pas sur la route de la démocratie directe chère à notre association. Il faut donc féliciter le conseil municipal de Verrue et les autorités cantonales de cette initiative.

L'élection des représentants des jeunes a eu lieu très vite, dès le 23 juin. Un Verrucois, Guillaume Arnould, est parmi les 15 élus (un autre jeune de notre commune, Christophe Maury, a depuis déménagé). J'ai voulu mieux le connaître et savoir quelles étaient ses intentions au sein du Conseil des Jeunes. Malheureusement, Guillaume Arnould et ses parents ont refusé de me recevoir.

Les questions que j'aurais aimé lui poser étaient pourtant bien anodines : qui il est, comment s'est passée cette élection et que pense-t-il du faible taux de participation (40 %), quels sont ses projets, comment voit-il son rôle au sein du conseil et comment compte-t-il faire profiter de son expérience les autres jeunes de la commune. (Une question d'actualité pourrait-être celle de la "rave party" qui vient d'avoir lieu à Verrue : que pense-t-il de ce qui s'est passé, que veulent les jeunes et comment concilier leurs désirs avec le souhait de calme bien compréhensible des Verrucois adultes ?). Les colonnes de ce bulletin lui restent ouvertes si lui-même et ses parents changent d'avis. Sinon, espérons qu'il choisira un autre moyen (la lettre d'information de la mairie par exemple) pour communiquer avec les tous les Verrucois, jeunes et vieux, qui s'intéressent à ce que font et ce que souhaitent les jeunes.

J'explique ailleurs dans ce bulletin ce qu'est la gouvernance. Son principal aspect consiste à faire participer toutes les parties qui s'intéressent à une question donnée. Pour ce faire, et maintenant je ne m'adresse plus au jeune Guillaume mais aux élus qui ont lancé l'idée du conseil des jeunes, il ne suffit pas de créer un "Conseil des jeunes", il faut que cet organe de gouvernance applique réellement les principes de la gouvernance, c'est-à-dire qu'il s'ouvre à toutes les parties intéressées. Ces parties intéressées sont les jeunes eux-mêmes, bien sûr, mais aussi leurs parents et toutes les personnes et associations qui manifestent un intérêt quelconque pour la question, même si elles ne sont pas dans les petits papiers de la mairie. J'ai manifesté un intérêt pour ce Conseil des jeunes, je suis donc une partie intéressée. Alors, la gouvernance, ça vient ?
 
 



Bulletin 9 : septembre 2002

Gouvernance, le nouveau mot à la mode

Depuis que M. Raffarin l'a employé, le terme "gouvernance" est sur toutes les lèvres, mais savez-vous vraiment ce que c'est ? Si vous faites une recherche sur Internet, vous trouverez diverses définitions qui, toutes, expliquent que la gouvernance est une nouvelle façon de gouverner qui consiste à faire du citoyen un acteur important du développement de son territoire. Alors que dans la méthode de gouverner traditionnelle, le gouvernement, les décisions viennent du haut et sont subies par les citoyens ordinaires qui n'ont pas voix au chapitre, la gouvernance reconnaît l'importance de la participation de toutes les parties intéressées, que ce soit à l'étape de formulation de la politique ou à celle de sa mise en œuvre.

Par exemple, dans l'agglomération de Lyon, le "conseil de développement du Grand Lyon" constitué en février 2001 comprend cinq groupes de travail composés des personnes suivantes (cf. www.millenaire3.com) :
· 32 membres représentant les principaux acteurs sociaux
· 12 membres désignés comme experts par le président du Grand Lyon
· 500 membres volontaires qui peuvent être des citoyens ou les représentants d'organisations

On voit bien par ces chiffres l'importance accordée par la gouvernance à la participation des citoyens. Puisque notre nouveau Premier ministre a mis ce mot à la mode, on peut s'attendre à ce que ces principes soient appliqués partout en France et en particulier par les gens du même bord que M. Raffarin et ce à tous les niveaux, y compris le niveau communal.

C'était d'ailleurs bien ce qui était prévu après les élections de l'an dernier, puisque le conseil municipal de Verrue avait annoncé, dès septembre 2001, qu'il préparait une réunion publique destinée à informer les habitants de la commune de ses objectifs et "à connaître vos attentes et vos désirs afin de les étudier attentivement". C'est tout à fait dans la ligne de la gouvernance prônée par M. Raffarin et, si ce n'est pas encore la démocratie directe souhaitée par notre association, c'est en tous cas de la démocratie participative. En ce sens, Verrue Quoi ne peut que féliciter la mairie de ce pas dans la bonne direction, à condition que les déclarations d'intention se traduisent par des actes, ce qui n'est pas toujours le cas pour le moment (voir notre courrier des lecteurs). Maintenant que M. Raffarin lui-même fait de la pub pour la gouvernance, espérons que le conseil municipal ne nous fera plus attendre bien longtemps cette fameuse réunion.
 


Bulletin 10 : novembre 2002

Ce n'est pas parce que c'est écrit que c'est vrai !
Geneviève Delachaume

De nos jours, on peut compléter en disant "ce n'est pas parce qu'on vous le montre que c'est vrai".

Le 16 octobre 2002, ma fille me téléphone, outrée, me disant à chaud qu'elle venait de voir sur Arte un documentaire prouvant à l'aide d'images d'archives et de témoignages que le soi-disant débarquement des Américains sur la lune le 21 juillet 1969 était un coup monté, fabriqué de toute pièce en studio par Stanley Kubrick.

Il s'agissait en fait d'une émission réalisée par William Karel qui voulait prouver combien il est facile en mêlant le vrai et le faux, de désinformer, de manipuler les esprits et de "prouver" n'importe quoi par l'image et le son. Ma fille avait pris le document en route et éteint le poste pour m'appeler juste après la dernière image ; elle n'avait donc pas vu l'introduction ni la conclusion de l'émission qui rétablissaient la vérité. Elle n'a d'ailleurs pas été la seule à se faire piéger puisque certaines personnes d'Arte, au moment où elles ont vu ce film pour la première fois, ont cru que leur chaîne avait déniché le scoop de l'année !

Si le premier garant de la démocratie est la liberté de la presse, le second est bien notre propre esprit critique. Cultivons-le !


Bulletin 11 : janvier 2003

Les différends entre Loudun et la CCPL
Geneviève Delachaume

Sous le titre "Loudun-CCPL : le torchon brûle", la Nouvelle République du 20/12/02 a fait état des revendications présentées à la CCPL par M. Touret, maire de Loudun. Outre des problèmes techniques liés à la collecte et la répartition des taxes et dotations de fonctionnement, M. Touret s'étonne que Loudun, 8111 habitants, ne bénéficie que de trois représentants alors que par le jeu des communes associées, le conseil municipal de La Grimaudière, 412 habitants, compte six représentants et celui de Moncontour, avec 996 habitants, en a huit.

Le maire de Loudun a donc "demandé au conseil (municipal) de se prononcer sur ces points : une représentativité plus juste (de Loudun) au sein de la CCPL, 30 % des voix avec une minorité de blocage sur tous les dossiers intéressant directement Loudun, la prise en charge d'équipements d'intérêt communautaire, un refus de la taxe professionnelle unique dans la situation actuelle, une meilleure information et une transparence financière." Ces propositions ont été acceptées par tout le conseil municipal de Loudun, y compris les élus de la liste de Mme Poisson et ceux de la Gauche plurielle, à l'exception de M. Lantier qui s'est abstenu en évoquant le "soviet suprême de la CCPL" tandis que M. Claude Salmon (élu sur la liste de Mme Poisson) posait à propos du budget la question : "Ne pourrait-on pas saisir la cour des comptes ?"

Il y a très longtemps, pour notre part, que nous vous exprimons nos craintes concernant la gestion de la CCPL et les éventuelles retombées financières à venir pour les habitants de la communauté de communes. Nos craintes s'étaient trouvées renforcées par le rapport de l'ancien sous-préfet Chassagnard, intervenu brièvement comme consultant auprès de la communauté de communes, puis "remercié" par cette dernière. Le fait que maintenant la ville principale de la communauté, par l'intermédiaire de son maire exprime son désaccord et son inquiétude devrait inciter, me semble-t-il, les habitants mais surtout les élus de nos communes à s'intéresser de plus près à des problèmes dont ils devront un jour rendre compte à leurs propres administrés.

Réponse de M. Belin dans la NR du 21/12/02 : "Trois maîtres mots caractérisent mon action : clarté, maîtrise, rigueur".Nous aurions préféré une réponse circonstanciée et précise, point par point, aux critiques formulées par M. Touret.
 
 


Bulletin 12 : avril 2003

Le coup du pagure

Avez-vous déjà observé un pagure changeant de coquille ? Ce crustacé, communément appelé bernard-l'ermite, a des problèmes de croissance : incapable de sécréter sa propre maison, il doit en emprunter une vide et en changer à mesure qu'il grandit.

L'emménagement dans son nouveau logis est l'occasion d'un cérémonial compliqué. L'animal à l'étroit cherche une coquille abandonnée de taille convenable. Il tourne autour, la flaire, introduit prudemment ses pinces dans l'ouverture, s'effraye d'une ombre et recule, revient, se glisse lentement jusqu'à ce qu'il ait constaté de ses griffes que nul danger ne se cache au fond de la coquille. Enfin rassuré, il ressort à reculons, fait un demi-tour rapide et introduit son abdomen fragile dans le calcaire protecteur.

A le voir faire tout ce cirque, le biologiste voudrait bien aider le pauvre animal. D'une pince sûre, il attrape le pagure et l'enfonce de force jusqu'au fond de la coquille. Mais cette introduction forcée n'est pas du goût de l'animal. Il devrait pourtant se rendre compte que tout s'est bien passé et qu'il est maintenant en sécurité, mais non, son cérémonial lui manque. Il s'empresse de ressortir et de reprendre ses manigances, pinces les premières...

Combien de nous sont des pagures dans la vie ! Si nous nous trouvons à l'étroit dans des structures politiques dépassées, nous avons envie d'en changer mais il nous faut examiner à notre rythme le nouveau système qui nous est proposé. Si un idéologue cherche à nous introduire de force dans un système qu'il croit nous convenir mais que nous n'avons pas exploré nous-mêmes, nous nous rebiffons et nous nous en échappons bien vite.

Il faudra que je me souvienne du coup du pagure et que je vous laisse à tous le temps de vérifier du bout des pinces que la démocratie directe ne comporte aucun danger caché...



Bulletin 12 : avril 2003

Notes de lecture : pour une nouvelle gouvernance de Jean-Pierre Raffarin

La lecture du livre publié (éditions de l'Archipel) l'année dernière par l'actuel premier ministre est pleine d'enseignements. Je me contenterai ici d'en citer quelques passages notés au vol.

Sur les droits des individus
"… la reconnaissance de la liberté de la personne implique d'autres reconnaissances, notamment celle de la responsabilité et du mérite (…) Quel est dès lors le rôle de l'action publique ? Elle doit aider les individus à prendre conscience de leur responsabilité et surtout ne pas leur enlever ce droit."  (p. 107)

Sur les droits des associations
"Les associations sont une forme d'engagement politique : il faut les favoriser. Elles habituent les hommes à se passer du pouvoir central. L'énergie déployée dans l'association est autant de force soustraite aux gouvernants, autant d'indépendance opposée à leur emprise." (p. 133)

Sur le pouvoir, cette citation de Tocqueville : "La toute-puissance me semble en soi une chose mauvaise et dangereuse […] Il n'y a donc pas, sur la terre, d'autorité si respectable en elle-même, ou revêtue d'un droit si sacré, que je la voulusse laisser agir sans contrôle et dominer sans obstacle" M. Raffarin ajoute ce commentaire : "L'Etat ne doit donc être qu'une ressource dont l'objectif est le garant de l'épanouissement de la personne dans la société." (p. 114-5).

M. Raffarin recommande d'ailleurs le "plafonnement du nombre de renouvellements pour certains mandats (certains maires le sont depuis vingt ans !)." (p. 164)

Sur la nécessité de la consultation, cette citation d'Albert Camus : "le démocrate est modeste car il reconnaît qu'il a besoin de consulter les autres." (p. 116)

Enfin, j'ai gardé le meilleur pour la fin :
"A l'échelon local, le référendum d'initiative populaire et la communication interactive doivent accompagner des élus qui ne pourront plus, ainsi, se replier sur la légitimité de leur seule élection." (p. 151)
Il est très instructif de rapprocher ce passage, publié en 2002, de ce que disait M. Monory, le 5 janvier 2001, aux maires des communes du Loudunais à qui l'association Bien Vivre en Scévolles avait osé demander d'expliquer les raisons de leur soutien au projet Naturascope. M. Monory écrivait alors : "Il semble utile de rappeler aujourd'hui que vous avez été élu au suffrage universel et que c'est bien de là que vous retirez toute votre légitimité." A noter que, lors de la campagne qui a précédé les élections municipales et cantonales de 2001, j'ai demandé à M. Belin ce qu'il pensait de la position de M. Monory et il a confirmé qu'il l'approuvait.

Tout ceci montre bien que nous vivons dans une région qui en est resté aux pratiques de la Troisième république et qu'il est temps que nos élus locaux se rendent compte que le numéro a changé puisque nous en sommes à la Cinquième et que les propos de M. Raffarin annoncent déjà ce qui sera très certainement dans la constitution de la Sixième.

On m'a rétorqué que M. Raffarin n'a jamais été élu et qu'il ne sait donc pas de quoi il parle. Il n'est pas nécessaire d'être menuisier pour savoir que les coups de marteau font mal aux doigts et tout être humain raisonnable peut voir que ce que l'on appelle ici la démocratie est loin de donner le vrai pouvoir aux citoyens puisqu'on ne nous laisse que le droit de choisir nos maîtres.

Pour une fois qu'un responsable s'en rend compte et qu'il l'écrit, je dis (exceptionnellement !) "Vive Raffarin !"



Bulletin 13 : juin 2003

WYSIWYG

WYSIWYG est un excellent concept qui nous vient de l'argot de l'informatique. Ce mot à l'allure abominable mais qui se prononce simplement "oui-zi-ouigue" veut dire "what you see is what you get", c'est-à-dire ce que vous voyez (sur l'écran de votre ordinateur) est ce que vous obtiendrez (quand vous l'imprimerez). Certains logiciels ne respectent pas ce principe : vous pouvez préparer à l'écran un document qui correspond tout à fait à ce que vous souhaitez mais quand vous l'imprimez, c'est la catastrophe : les chiffres sortent des limites des tableaux, les images ne sont plus centrées, les textes se retrouvent en italiques... bref, on ne peut rien tirer du document qu'il faut mettre à la corbeille.

Combien d'entre nous feraient bien d'appliquer ce principe, combien s'entortillent en se disant "mais si je dis ceci, les gens vont comprendre cela et ils vont penser que j'ai en fait l'intention de...". Il faut bien admettre que, cette habitude étant bien ancrée chez la plupart d'entre nous, les gens qui nous écoutent se disent en effet "Ah, ha ! Il a dit ceci mais je parie que ça veut dire qu'il pense cela..." C'est ridicule : jusqu'où allons-nous ainsi ?

Comme la vie serait plus facile si nous étions tous WYSIWYG, si nous disions tous ce que nous pensons vraiment. Si les gens comprennent de travers, il suffirait de leur expliquer de nouveau et, s'ils refusent de nous croire, de laisser à nos actes le soin de prouver à tous que "ce que je vous dis est bien ce que je pense".



Bulletin 14 : septembre 2003

La participation à Monts sur Guesnes

J'ai pu assister en tant que "personne concernée" à la récente réunion thématique organisée par la mairie de MSG dans le cadre de la définition de son Plan Local d'Urbanisme (PLU). Ces réunions sont habituellement réservées aux représentants de ce qu'il est convenu d'appeler les "parties prenantes", conseils municipaux, services techniques, associations, etc. Lors d'une précédente réunion, j'ai pu, en tant que représentant de Verrue Quoi, expliquer que la participation c'est aussi, c'est même surtout, la participation de ceux que j'ai appelés les personnes concernées : "il s'agit de toutes les personnes qui se sentent touchées directement ou indirectement et de près ou de loin par un projet et qui veulent être informées ou participer à ce projet de quelque manière que ce soit, à titre individuel ou au sein de divers groupes".

Je suis heureux de voir que mes arguments ont été entendus et que les personnes concernées ont été conviées aux réunions thématiques suivantes. En revanche, je suis inquiet de constater que bien peu d'habitants de la région se sentent suffisamment concernés pour participer à ces réunions au cours desquelles se décide pourtant l'avenir de la commune de Monts sur Guesnes et, par l'intermédiaire du projet Beaumont, celui des communes environnantes, dont Verrue. Au cours de la réunion publique du 26 mai, seuls deux assistants ont évoqué des problèmes précis qui les concernaient personnellement. Le 30 juin, seules deux "personnes concernées" s'étaient jointes aux 21 représentants des "parties prenantes".

C'est très peu. J'en ai fait la remarque et M. Belin m'a répondu en évoquant la peur que ressentent la plupart des gens lorsqu'il leur faut prendre la parole en public. Cette peur est bien réelle, j'en conviens, mais elle ne suffit pas pour expliquer ce manque de participation : même si les personnes concernées n'osent pas parler, elles pourraient au moins venir écouter ce qui se dit lors des réunions thématiques. Puisque la plupart des gens ne se dérangent pas, c'est qu'ils ne se considèrent pas comme des "personnes concernées". M. Belin souhaite donner aux élus des associations un rôle de relayeurs de l'opinion publique mais ceci ne résout pas le problème puisque les associations et leurs représentants ne sont que des "parties prenantes".

L'absence de participation individuelle est un problème grave dans la mesure où les plans d'aménagement de la région sont présentés comme des projets de développement durable et que la participation individuelle est la condition sine qua non de ce genre de projets. En effet, pour qu'un plan de développement puisse être décrit comme durable, il ne suffit pas qu'il respecte les ressources naturelles. Il faut, pour qu'il perdure, que les habitants le considèrent comme "leur" projet, qu'ils s'y investissent et qu'ils soient prêts à le protéger, à le maintenir et à le développer dans le long terme. Ils ne le feront que s'ils se sentent concernés et ce sentiment n'apparaîtra que si les habitants ont participé à toutes les phases de définition et de mise en place du projet. Force est de constater que, dans les projets actuels de la mairie de Monts sur Guesnes, on est loin du compte et les effets négatifs de cette situation se font déjà sentir : lors de la réunion thématique "Tourisme et Loisirs" du 30 juin, on a parlé de tout sauf du tourisme. Il est probable que ce sujet aurait été abordé et traité si des personnes concernées par le développement du tourisme avaient été présentes.

Que faire pour améliorer cette situation ? Il faudrait d'abord que les élus se rendent compte de l'existence d'un problème. Il est un fait que la participation des habitants n'est pas encouragée. Ici, à Verrue, les bonnes résolutions initiales de la nouvelle municipalité (ouverture d'un cahier de suggestion, promesse d'une grande réunion d'information) n'ont pas été suivies d'effets. A quoi sert-il d'inscrire des questions ou des remarques dans le cahier de la mairie s'il n'en est jamais fait mention lors des réunions du conseil municipal ?

Il faudrait ensuite sortir du cadre étroit du Loudunais et voir ce qui se passe ailleurs, en France dans le monde. Les projets de développement durable éclosent partout, avec une participation véritable. Sans aller jusqu'en Inde, dans les Andes ou en Afrique du Sud, nos voisins des Six Vallées semblent s'être engagés dans cette voie. Pourquoi ne pas aller leur demander des conseils ?

Encore faut-il que le discours sur la participation tenu par la Mairie de Monts sur Guesnes corresponde aux intentions réelles des élus. Quand on remarque que deux associations, Bien Vivre en Scévolles et Transparence, ont été "oubliées" lors de la réunion du 30 juin, on peut se poser des questions. Quand on veut faire de la participation, il faut accepter tout le monde, même les opposants les plus vocaux.



Bulletin 15 : novembre 2003
 
Le rôle des associations

Dans le dernier numéro (n° 14, page 5), j'ai fait part de quelques réflexions que m'inspire la participation telle qu'elle est comprise à Monts sur Guesnes. La situation est loin être parfaite (voir l'article "Pourquoi j'ai claqué la porte" dans le présent bulletin) mais je voudrais revenir sur un point très positif qui a pu échapper à certains lecteurs.

Lors d'une rencontre organisée par la Mairie de Monts sur Guesnes, j'ai soulevé le problème de l'absence de personnes concernées dans les réunions techniques où se joue l'avenir de la région. M. Belin a répondu qu'il souhaitait donner aux associations et à leurs représentants élus le rôle de relayeurs de l'opinion des populations. Ceci ne résout pas le problème du manque de participations des individus mais cette remarque du maire de Monts sur Guesnes, qui est aussi, ne l'oublions pas, président de la communauté de communes du pays loudunais et conseiller général, est d'une importance capitale pour les relations entre Verrue Quoi et la municipalité de Verrue.

En effet, le maire de Verrue et d'autres élus nous ont maintes fois reproché nos questions, notre habitude énervante d'assister à toutes les réunions du conseil municipal et, pire, d'y prendre des notes, notre prétention enfin à vouloir nous intéresser aux affaires communales. Un élu a même dit à l'un de nous, "si c'est vous qui aviez été élus, je ne serais pas venu vous embêter".

Je me suis souvent élevé dans ces pages contre une telle attitude, sans grand résultat je dois l'admettre, mais voici qu'un allié inattendu viens à mon secours puisque M. Belin lui-même déclare que les associations telles que Verrue Quoi doivent jouer un rôle de relais entre les citoyens et les élus. C'est ce que nous essayons de faire depuis deux ans.

Je demande au maire de Verrue et à ses conseillers de nous dire  s'ils sont conscients de ce changement d'attitude de la part du président de la communauté de communes et s'ils ont l'intention de répondre à son attente en acceptant enfin de donner un rôle à Verrue Quoi et aux autres "personnes concernées" qui essayent de faire entendre leur voix dans la commune. Ceci ne ferait que respecter la politique du gouvernement français puisque Monsieur Raffarin, dans sa circulaire du 24 décembre 2002 relative aux subventions de l'Etat aux associations, déclare : "Occupant une place essentielle dans de nombreux secteurs de la vie sociale, les associations sont fréquemment conduites à compléter l'action menée par les pouvoirs publics, inspirant même à ces derniers de nouvelles formes d'intervention".

J'avais espéré au début de l'année voir enfin s'instaurer une collaboration réelle entre les élus municipaux et l'association, "relais de l'opinion publique" dixit M. Belin. Mes propositions de réalisations communes tiennent toujours. J'espère que la caution du président de la communauté de communes du pays loudunais incitera le conseil municipal de Verrue et son maire à les accepter.


Bulletin 16 : janvier 2004

Du bon usage de la discussion

Dans "L'Empire des anges" de Bernard Werber (Livre de Poche), mon attention a été attirée par ce passage (page 164) où l'auteur parle de l'archipel de Vanuatu dans le pacifique :

"Il n'existe pas de concept de majorité imposant son choix à une minorité. Lorsque les habitants ne sont pas d'accord, ils discuteront entre eux jusqu'à parvenir à l'unanimité. Evidemment, chaque discussion prend du temps. Certains s'entêtent et refusent de se laisser convaincre. C'est pourquoi la population de Vanuatu passe un tiers de ses journées en palabres afin de se persuader du bien-fondé de ses opinions. Lorsqu'un débat concerne un territoire, la discussion peut durer des années, voire des siècles, avant de déboucher sur un consensus. Entre-temps, l'enjeu restera en suspens. En revanche lorsque enfin, au bout de deux ou  trois cents ans, tout le monde se met d'accord, le  problème est véritablement résolu et il n'existera  pas de rancœur car il n'y aura pas de vaincus."
 
J'imagine déjà la levée de boucliers : palabrer pendant des années ! Quelle perte de temps ! En 2000, si j'étais allé dire à nos élus qu'il fallait passer trois ans à inciter les gens à participer à la définition d'un projet durable, ils m'auraient ri au nez. Et pourtant... Si nous avions, tous, passé trois années à palabrer, rien n'aurait encore été fait aujourd'hui, c'est vrai, mais nous aurions un projet solide, accepté par tous, la communauté de commune n'aurait pas dépensé des millions d'euros en pure perte et la forêt de Scévolles n'aurait pas été défigurée par un défrichement abusif.

Hâtez-vous lentement disait le fabuliste. Prenez le temps de parler nous disent les peuplades que l'on dit sauvages. Combien d'élus préfèrent aller de l'avant et, s'appuyant sur la dictature de la majorité, ou sur la raison du plus fort, ils veulent montrer leurs qualités de chef (au bénéfice de nos nombreux lecteurs étrangers, je précise que "chef" veut dire "leader" en anglais, "duce" en italien, "caudillo" en espagnol et "führer" en allemand) et faire sans perdre un instant des bêtises monumentales.

Ce qui est triste, c'est que la plupart des gens pensent qu'ils ont raison. Les projets foirés peuvent s'accumuler, l'argent peut continuer d'être jeté par la fenêtre, on me répond en cœur, toutes tendances confondues : "perdre des années à se mettre d'accord, quelle idée insupportable !"

Qui habet aures audiendi audiat !
(voir dans les pages roses du Petit Larousse)




Bulletin 17 : mars 2004

La participation à Verrue

Y a des jours où je me dis que l’idée de créer à Beaumont un centre sur le développement durable n'est peut-être pas aussi stupide qu’elle en a l’air à première vue. Un tel centre pourrait au moins servir à expliquer quelques notions de base à nos élus.

Cette réflexion m'est venue à la lecture du dernier bulletin  publié par la mairie de Verrue (Infos 2004/1) dans lequel le vote unanime des statuts de la CCPL est annoncé sans un mot d'explication et qui ne comporte pas un seul mot sur les enquêtes en cours sur la carte communale et sur l'assainissement de Verrue.

Je ne sais pas ce que vous pensez de ces pratiques mais ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas du développement durable dont la pierre angulaire est la participation de la population concernée à toutes les étapes d'un projet.

Dans le cas des statuts de la CCPL, je parle ailleurs de la question épineuse de la répartition des pouvoirs entre grandes et petites communes. La solution adoptée est donc d'une importance capitale pour notre commune et pourtant, avez-vous eu l'impression qu’il y ait eu le moindre débat ? Ce qui est certain, c’est qu’il n’y a pas eu de débat avec les personnes concernées, c'est-à-dire vous et moi.

En ce qui concerne la carte communale, c'est encore pire ! On ne parle plus dans ce cas de ce qui se passe à Loudun ou à Monts sur Guesnes, lieux mystérieux et bien éloignés de chez nous, mais de l'avenir de notre commune. Le bulletin de la mairie annonce que le projet "correspond aux objectifs que s'est fixés la commune en ce qui concerne l'aménagement, la protection et la mise en valeur du territoire communal" mais ces objectifs ne sont pas précisés et ils ont été fixés sans la moindre consultation des personnes concernées, c'est-à-dire vous et moi.

Quel avenir pour Verrue ? Notre commune doit-elle se résigner à son avenir de village dortoir ? Doit-elle redevenir une véritable communauté ? Doit-elle retenir les jeunes ? Doit-elle attirer de nouveaux habitants ? Un lotissement est-il nécessaire ? Si oui, où doit-il être installé ? Faut-il préserver le cadre de vie et l'aspect du village ? Ces quelques questions viennent immédiatement à l'esprit. Il doit être possible d'en poser bien d'autres. L'important est que les questions soient posées et que les réponses soient données par les personnes concernées, c'est-à-dire vous et moi.

En même temps que l'enquête sur la carte communale, une autre enquête a été lancée sur l'assainissement. A première vue, elle pourrait permettre une meilleure participation des habitants puisqu'elle est inachevée et qu'elle propose quatre options principales. Le problème ici est que cette enquête n'est nullement comprise comme une concertation participative mais comme une pure formalité administrative. Il aurait fallu faire une première réunion de tous les habitants pour présenter les conclusions des experts et recueillir les premières questions à chaud. Une seconde réunion, après une certaine période de réflexion, aurait pu permettre un véritable débat entre toutes les personnes intéressées, les experts étant présents pour répondre aux questions techniques. Ensuite, d'autres réunions auraient dû être organisées jusqu'à ce que tous les problèmes aient été identifiés, que toutes les questions aient été posées et que chacun ait eu le temps de se faire une opinion. En cas de divergences de vues, un vote final aurait permis au village entier de faire son choix en toute connaissance de cause.

Je sais que l'association Verrue Quoi n'est pas toujours bien vue mais je ne demande pas ici la parole pour les membres de la « clique ». Je demande aux élus de se rendre compte que les temps ont changé et que, dans le monde entier, les citoyens exigent d'avoir enfin leur mot à dire.

Après avoir écrit ces mots, je découvre dans le numéro de février 2004 de « Pays d’avenir », le magazine de la Communauté de Communes du Pays Loudunais, un article en page 4 qui annonce « une démarche de démocratie participative ». Hurlant de joie, je le lis d’un trait pour découvrir, hélas, qu’il n'est question que d’un « Conseil de développement du Pays loudunais » composé de 25 membres (choisis par qui ?). Les « membres de la société publique » sont bien invités à offrir leurs témoignages et leurs suggestions mais le projet final sera validé par « les élus du Loudunais, les représentants de l’Etat et la Région ». Si c’est comme cela que la Communauté de Communes du Pays Loudunais voit la participation, j’invite son président à s’inscrire immédiatement sur la liste des élèves du futur centre d’enseignement du développement durable. Il finira peut-être par comprendre ce concept.




Bulletin 17 : mars 2004

De la démocratie (1)

Un membre de notre association m’a récemment demandé ce que j’avais à redire de la démocratie en France. La réponse est simple : le problème est que la démocratie n’existe pas dans le monde actuel. Vous êtes choqué ? Vous ne me croyez pas ? Je m’explique.

Il existe une infinité de manières de gouverner une communauté humaine mais la plupart peuvent être regroupées dans quatre grande catégories : monarchie, oligarchie, démocratie et anarchie.

La monarchie, c’est le pouvoir (archos) d’un seul (mono), que ce soit un roi (on parle alors de royauté), un empereur, un dictateur, un tyran ou qui que ce soit d’autre.

L’oligarchie, c’est le pouvoir d’un petit groupe de personnes (oligo = quelques-uns). Ce petit groupe pouvant être des aristocrates (aristo veut dire « les meilleurs »), des prêtres (on parle alors de théocratie, comme si le pouvoir était exercé par un ou des dieux -théo- et non par leurs représentants), les riches (ploutocratie du grec ploutos, richesse) ou tout autre groupe plus ou moins limité.

La démocratie, c’est bien entendu le pouvoir exercé par le peuple, tout le peuple, c'est-à-dire l’ensemble des habitants d’une région.

L’anarchie enfin est une catégorie bien mal connue et souvent réduite dans l’esprit des gens à l’absence de toute contrainte et au refus de toute règle, donc au désordre. Je ne suis pas d’accord avec cette définition trop limitée mais ceci sort de mon présent propos.

Revenons-en donc à la démocratie. En France, et dans pratiquement tous les pays au monde, le pouvoir donné aux citoyens se réduit souvent à la possibilité de choisir ceux qui vont les représenter. A priori, c’est une bonne idée car il ne serait pas possible à chacun de nous de participer en personne aux différents niveaux de gouvernement : commune, région, état, etc. L’ennui, c’est que les choix qui nous sont offerts sont très limités et que les seules personnes susceptibles d’être élues sont les membres des divers partis politiques. Quel est la chance d’un citoyen lambda, aussi brillant soit-il, d’être élu président de la république s’il n’est pas soutenu par tout l’appareil d’un parti ? Nul, bien entendu. Ceci est presque toujours vrai aussi de l’élection des députés, des sénateurs et d’autres « représentants » du peuple. Je dis « presque toujours » car il existe des exceptions mais ce ne sont en principe que des feux de paille et les élus qui ne font pas partie du système sont vite récupérés par lui : souvenez-vous de Poujade dans les années 1950.

Donc, les citoyens ont bien le droit de choisir ceux qui les représentent mais uniquement parmi un petit groupe de personnes : les membres des partis politiques. Revoyez les définitions ci-dessus : nous avons chez nous non une véritable démocratie mais une oligarchie.

Cette situation est-elle immuable et n’existe-t-il aucun espoir d’instaurer un jour une démocratie véritable ? Nous verrons dans le prochain numéro comment la participation peut nous faire accomplir un premier pas dans cette direction.


Bulletin 17 : mars 2004

Les statuts de la CCPL : un problème de fédéralisme

Une petite phrase m'a fait sauter en l'air dans le compte rendu du conseil municipal du 8 janvier publié dans notre bulletin (n° 16, pages 1 et 2). En effet, j’y ai lu que, selon Monsieur Belin, en cas de désaccord entre la CCPL et la ville de Loudun, ce sera au préfet de région de trancher en tenant compte du fait que "la représentativité est le seul point de blocage opposé par Loudun".

La représentativité "seul" point de blocage, excusez du peu ! Mais la question de la représentativité est LA question fondamentale à résoudre quand des entités préexistantes décident de se regrouper. C'est la question de la représentativité qui a failli empêcher la création des Etats-Unis en 1776 et qui a failli faire voler ce pays en éclats pendant la Guerre de Sécession, c'est elle qui, aujourd'hui, met des bâtons dans les roues de la construction de l'Europe.

On peut voir de même la Communauté de Communes du Pays Loudunais comme une association d'entités précédemment indépendantes (les communes) qui hésitent entre une fédération et une confédération. Je rappelle qu'une confédération est une union de plusieurs Etats qui s'associent tout en conservant leur souveraineté (cas de l'Union européenne actuelle) tandis qu'une fédération est l'union de plusieurs Etats en un seul Etat fédéral (USA). Chez nous, la CCPL était une fédération de fait sous le pouvoir de René Monory. La ville de Loudun voudrait retrouver une certaine souveraineté et donc transformer la CCPL en une confédération dans laquelle le pouvoir central serait limité par le droit des communes, en particulier par un droit de veto de fait accordé à Loudun.

Je pense que, au-delà des querelles de personnes, la question se pose parce que la CCPL est l'union assez monstrueuse de 48 communes dont une très grande (Loudun 8111 habitants) et 47 très petites (dont Monts sur Guesnes 656 habitants et Verrue 355 habitants ; chiffres trouvés sur le site Internet de Quid). Je dis union monstrueuse parce que la CCPL, seconde communauté de communes de France par le nombre de communes qu'elle associe, n'aurait jamais dû voir le jour. Sa taille et son histoire en font un exemple typique de ce que l'on appelle aujourd'hui un pays (comme le montre bien son nom d'ailleurs), un pays étant composé de plusieurs communes ou communautés de communes de taille ordinaire.

Je n'irai pas chercher les raisons pour lesquelles cet énorme rassemblement a été créé à l'époque sous la houlette de Monsieur Monory. Il est plus intéressant de chercher comment sortir de l'impasse sans aller pleurer dans les jupes de l'autorité préfectorale.

Le problème, je viens de le dire, réside en la disparité qui existe entre la taille de Loudun et celle des autres communes. Il faut donc égaliser un peu ces tailles. On pourrait imaginer découper Loudun en communes plus petites, mais je doute que les intéressés soient d'accord ! Il me semble au contraire plus faisable d'augmenter la taille des autres communes selon l'itinéraire suivant :
- Dissoudre la CCPL
- Créer un certain nombres de véritables communautés de communes regroupant chacune une demi-douzaine à une douzaine de communes réellement liés par des intérêts similaires (exemple : une communauté "forêt de Scévolles" avec Verrue, Saires, Guesnes, et quelques autres)
- Regrouper ces communautés de communes et Loudun en un véritable "pays", le Pays loudunais bien entendu, dans lequel les différents "Etats" auraient à peu près la même taille et donc les mêmes pouvoirs.

Je me doute bien que ma proposition ne va pas plaire aux politiciens qui risquent d'y perdre leur place et je sais d'avance qu'ils vont la tourner en dérision avec l'argument sans réplique que ça n'a jamais été fait dans le passé et donc que c'est impossible (à se demander comment on a  réussi à sortir un jour des cavernes...). Plutôt que leur répondre, je préfère demander aux habitants de Verrue : où se trouve votre intérêt  et celui de votre commune ? Est-il préférable d'être la 48ème roue du carrosse d'une CCPL qui décide de tout sans s'occuper de vous ou bien de faire partie d'une petite communauté de communes solide, capable de parler d'égal à égal avec ses partenaires de même taille (et de faire respecter ses droits et ses intérêts) au sein d'un pays commun ?




Bulletin 18 : juin 2004

De la démocratie (2)

J'ai montré dans le dernier bulletin comment les régimes de gouvernement actuels, en France et partout dans le monde, ne peuvent pas être dits "démocratiques". Avant de proposer des remèdes à cette situation il faut nous demander si nous souhaitons réellement l'établissement d'une véritable démocratie, c'est-à-dire du gouvernement d'une communauté par les individus qui la composent. Voulons-nous vraiment permettre à l'homme de la rue, c’est-à-dire vous et moi, de prendre des décisions et de faire des choix ? C'est assez amusant de parler aux gens de démocratie directe. Même ceux qui aiment l'idée se hérissent quand on commence à entrer dans les détails. En fait, ce principe est combattu plus ou moins ouvertement par diverses catégories de personnes.
Les politiciens professionnels, eux, sont prêts à défendre leur biftèque, bien entendu, et ils s'opposeront à toute tentative de suppression de leur classe. C'est normal, c'est humain et on n'y peut rien. Cependant, la classe politique ne représente qu'une infime proportion de la population d'un pays, quelques milliers de personnes tout au plus, et elle ne pourrait se maintenir au pouvoir sans l'assentiment plus ou moins conscient d'une majorité de citoyens. Quelles sont donc les raisons de cet assentiment ?
La démocratie telle que je l'ai définie sera combattue d'abord par les partisans de l'oligarchie qui trouvent normal de donner le pouvoir à un groupe restreint de personnes. Je mets dans cette catégorie les partisans de la technocratie et ceux de l'aristocratie (voir la définition de ces termes dans le précédent bulletin).
La technocratie consiste à donner le pouvoir réel aux personnes qui possèdent des compétences techniques. Il s'agit donc bien d'une oligarchie (le pouvoir appartient à un petit groupe de personnes). Les partisans de la technocratie sont effrayés par la complexité du monde moderne. Ils pensent que seuls les "experts" peuvent le comprendre et nous diriger dans ses labyrinthes. C'est confondre le choix des buts à atteindre et la définition des moyens techniques qui permettent de mettre en oeuvre ces choix. Les experts sont indispensables, nul ne songe à le nier, mais il ne faut pas leur abandonner le pouvoir. Il faut des experts pour définir les problèmes techniques et appliquer des solutions techniques, d'accord. Par contre, n'importe qui peut avoir son idée sur la définition des buts à assigner à ces fameux experts. 
D'une manière plus générale, nombreux sont les partisans de l'aristocratie, système de gouvernement dans lequel, étymologiquement, le pouvoir est abandonné à un petit groupe de gens qui se définissent comme étant "les meilleurs". Les partisans d'un régime aristocratique sont tous ceux qui considèrent que seules certaines personnes (en particulier eux-mêmes et ceux qui pensent comme eux) sont suffisamment intelligentes pour s'occuper du gouvernement de la communauté : les autres sont trop bêtes pour comprendre ce qui est bon pour eux. Le vrai démocrate (toujours selon les définitions du précédent article), lui, est persuadé que même le plus stupide des citoyens (et stupide selon quels critères ?) possède des droits imprescriptibles dont celui de faire entendre sa voix. 
Avons-nous fait le tour des partisans potentiels du système oligarchique actuel ? Loin s'en faut car oligarchie, technocratie, aristocratie sont des concepts idéologiques et l'idéologie intéresse bien peu de monde à notre époque. Je crois que le système dure pour des raisons qui se rattachent à des faiblesses humaines telles que l'intérêt personnel, la peur ou la paresse, qui sont, elles, bien répandues.
Une première catégorie de personnes dont les intérêts personnels s'accommodent très bien de la situation actuelle  rassemble tous les adeptes du "clientélisme". A l'époque romaine, la "clientèle" d'un sénateur se composait de toutes les personnes qui lui étaient redevables d'une faveur. En échange, le client soutenait son patron et votait systématiquement pour lui dans toutes les élections. On voit souvent cette attitude dans nos campagnes quand un maire (ou un conseiller général) rend service à ses administrés. Ceux-ci, reconnaissants, se croient tenus de voter pour lui à vie. Or, si l'élu leur a fait obtenir une chose à laquelle ils avaient droit, il n'a fait que son travail ; s'il leur a fait obtenir un passe-droit, il ne mérite pas d'être élu. A ce clientélisme rural naïf et bon enfant fait pendant au niveau national la collusion entre les politiciens et les dirigeants des grandes entreprises. Les uns financent les campagnes des autres qui leur renvoient l'ascenseur en leur accordant des contrats juteux. Tout le monde y trouve son compte, sauf l'idéal démocratique.
D'autres ont peur de perdre et de faire perdre à leur commune certains avantages s'ils votent "mal". Si, lors d'une élection cantonale par exemple, telle commune osait voter majoritairement pour un candidat malheureux, le conseiller général élu ne risquerait-il pas de se venger en refusant toute subvention aux rebelles ?
Les paresseux enfin sont très heureux d'abandonner le pouvoir à qui voudra le prendre : ils se trouvent trop occupés pour prendre le temps de s'intéresser à ce qui se passe dans leur commune ou leur pays. Nous sommes (presque) tous des paresseux, moi compris. J'avoue que jusqu'en 2001 je ne m'intéressais pas de près aux affaires municipales et il aura fallu la menace du Naturascope pour me réveiller.
La situation est-elle désespérée ? Sommes-nous condamnés à vivre sous la domination d'une oligarchie ? En fait, les choses sont en train de bouger un peu partout dans le monde et, dans le prochain article de la série, je me propose de montrer ce que nous pouvons faire, si nous le voulons, pour imposer davantage de démocratie sans rien changer aux institutions actuelles.



Bulletin 19 : juillet 2004

De la démocratie (3)

Dans le premier article de cette série, après avoir défini les divers modes de gouvernement possibles, j'ai montré que le système actuel ne donnait pas le pouvoir au peuple mais à un petit groupe de personnes (la classe politique) et qu'il s'agissait donc d'un régime oligarchique et non démocratique.

J'ai ensuite cherché dans l'article suivant quelles étaient les raisons de cette situation : les politiciens qui s'accrochent à leurs privilèges, les partisans de "l'aristocratie", qu'elle soit représentée par les technocrates ou par je ne sais quelle élite intellectuelle, ou bien encore les gens qui, par intérêt personnel ou par paresse, préfèrent remettre à des élus professionnels le soin de s'occuper de leurs affaires. Le tableau que j'ai dressé était noir, c'est vrai, mais il expliquait pourquoi cette situation dure depuis deux cents ans, en France et dans le monde.

Faut-il pour autant se résigner ? Faut-il dire que rien ne changera jamais et qu'il n'y a donc pas lieu de s'agiter ? Je ne le crois pas. Ce serait réagir comme un Parisien qui aurait gémi en juin 1789 contre la taille, la gabelle et les privilèges des nobles mais qui se serait résigné en se disant qu'il vivait sous l'Ancien Régime et qu'il n'y avait aucune raison que les choses évoluent.

Loin de moi l'idée de vous dire d'aller vous emparer des canons des Invalides et de prendre la Bastille, ce serait du théâtre... Cependant, nous avons la chance de vivre à une époque où le monde bouge et où des progrès sont possibles sans révolution. Vous ne me croyez pas ? Partout dans le monde les initiatives de participation se multiplient. Je lisais récemment que des Indiens des Andes en ont eu assez des promesses jamais honorées des politiciens du coin en mal de réélection. Ils ont pris leur destinée en main et ont créé un syndicat de l'eau dans leur vallée pour y lancer les bases d'un développement durable.

Dans le monde dit développé, des initiatives du même genre se multiplient et la participation est devenue le dernier mot à la mode. La preuve, c'est que les politiciens s'en sont emparés et que les plus autocrates d'entre eux n'ont que lui à la bouche. Il s'en faut encore de beaucoup pour que le pouvoir soit rendu aux individus mais le moment est favorable pour faire quelques pas dans la bonne direction. Que pouvons-nous faire dans le cadre de la constitution existante ?

Il est malheureusement impossible dans le système actuel de se débarrasser des politiciens et des partis politiques. A défaut, nous pouvons essayer de voter à chaque élection pour le moins mauvais ou le moins dangereux des candidats. Comment allons-nous le repérer ? En surveillant les points suivants :

Le cumul des mandats – Puisque nous sommes forcés de donner le pouvoir à l'un des membres de l'oligarchie politique, assurons-nous au moins que ce pouvoir soit aussi limité que possible. Votez systématiquement contre un candidat à un poste qui possède déjà un mandat à un autre niveau. Le maire d'une commune par exemple ne devrait pas être simultanément conseiller général et encore moins député ou sénateur. En revanche, il serait souhaitable que les gens qui veulent faire carrière en politique, puisqu'il en faut dans le système actuel, soient successivement conseiller municipal, puis maire, puis député ou sénateur, afin d'acquérir peu à peu l'expérience nécessaire.

La participation – Parmi les candidats restants, voyez quels sont ceux qui se déclarent partisans de la participation. Lors des réunions électorales, demandez leur comment ils se proposent de la mettre en pratique : vont-ils informer les habitants des problèmes qui se posent à la commune ? S'ils donnent des informations, vont-ils publier toutes les données disponibles ou se contenter du minimum légalement obligatoire ? Au-delà de l'information, le candidat promet-il de redonner le pouvoir aux individus en les consultant sur toute question importante engageant l'avenir de la commune ? Je rappelle que cette consultation ne se limite pas à une enquête administrative mais qu'elle doit passer par toutes les phases maintes fois décrites : définition du problème, présentation des faits, réunions d'information, recueil des opinions, questions et avis du public, nouvelles réunions de discussion et de recherche d'un consensus, le tout sous la surveillance d'un arbitre indépendant chargé de garantir le respect des règles par toutes les parties.

Le respect des promesses – On me dira qu'il est facile de faire des promesses avant l'élection en étant bien décidé à ne pas les tenir une fois élu. Il est bien évident que l'électeur conscient de ses droits et de ses devoirs aura de la mémoire : il se rappellera d'une élection à l'autre les promesses faites et les comparera aux réalisations de l'élu à qui il demandera des comptes lors des réunions électorales. Si un candidat une fois élu oublie ses engagements, il est évident que les électeurs trompés ne voteront pas pour lui une seconde fois. Son échec servira d'exemple à son successeur.

Je parle des questions à poser aux candidats mais que faire si certains d'entre eux ne tiennent pas de réunion électorale ? La réponse est simple : il faut systématiquement refuser de voter pour quelqu'un qui refuse d'expliquer ses intentions avant le vote. Ce serait vraiment lui remettre un chèque en blanc et le laisser libre de n'en faire qu'à sa tête jusqu'à l'élection suivante.

Si nous acceptions tous d'appliquer ces simples principes – refuser tout cumul de mandats, exiger du candidat qu'il s'engage à appliquer honnêtement des principes de participation universelle, surveiller d'une élection à l'autre que les élus qui se représentent ont bien rempli leurs promesses– nous disposerions rapidement du droit de faire entendre nos vues et d'imposer nos choix.

Ce droit suffira-t-il à introduire enfin l'ère de la participation ? Non bien sûr, car il ne suffit pas de posséder un droit, encore faut-il l'exercer.

Lors d'une récente enquête administrative organisée à Verrue sur deux questions qui engagent l'avenir de la commune, le plan communal et l'assainissement, combien d'entre nous sont allés consulter les dossiers et inscrire leurs remarques dans le registre ouvert à cet effet ? Bien peu malheureusement. Il est vrai que ces enquêtes étaient bien mal organisées et qu'il était facile de se rendre compte que nul ne tiendrait compte des remarques inscrites dans les registres mais c'était pour une fois l'occasion de faire entendre notre voix et bien peu l'ont saisie. Pourquoi ? Ce sera l'objet du quatrième chapitre de la série. Rendez-vous donc au prochain bulletin.